Un hamburger en forme de coeur, vous en avez déjà vu ? [ Pv Mika' Chou ]

Michael croisa les bras derrière sa nuque et fixa le plafond censé être blanc. Dans la douce pénombre de la nuit, il apparaissait gris. Il frissonna et resserra ses draps autour de lui ; il régnait un froid incroyable dans sa chambre en cette période. C’était une nuit d’hiver parfaitement ordinaire dans une chambre du campus, en somme. S’il tordait le cou pour jeter un coup d’œil à travers les vitres fermées, Michael pouvait apercevoir les lueurs des nombreux buildings de la grande ville. Sauf qu’attraper un torticolis n’était pour le moment pas son désir le plus cher. Le jeune homme eut un sourire et jeta un petit coup d’œil à son radio-réveil, indiquant qu’il était minuit passé de quinze minutes. Un léger soupir s’échappa de ses lèvres entrouvertes. Renonçant à toutes tentatives de s’endormir – en effet, passé onze heures du soir, il lui était impossible de plonger dans le sommeil ; le marchand de sable n’agissait pas sur demande – il s’approcha de sa fenêtre et tira un fauteuil pour s’asseoir dessus. Autant être installé confortablement s’il comptait rester là toute la nuit.

Un lancinant bipement résonna dans la vaste pièce. Michael poussa un grognement exprimant son mécontentement et tenta de rouler sur le dos, pensant qu’il était dans son lit, mais cela eu pour effet de le projeter sur le sol. L’adolescent garda les yeux hermétiquement clos, savourant ces quelques instants de solitude matinaux qui lui donnaient l’impression d’être seul au monde. Mais comme la sonnerie de son réveil allait crescendo, il fut bien obligé de se lever. Cela ne se fit pas en silence. Ses paupières se soulevèrent quelque peu, dévoilant des yeux d’un noir si sombre qu’on ne distinguait pas la pupille de l’iris, et le jeune homme se redressa lentement. Sa fenêtre était toujours ouverte, et soleil haut dans le ciel se reflétait dans la neige, signifiant que la journée était déjà bien avancée.

Avec un soupir déchirant, le jeune homme se mit debout, observant ses jambes flageolantes qui peinaient à le porter ; car malgré tout ce qu’il pouvait prétendre, il n’avait pas son quota de sommeil. D’ailleurs, cela se ressentait son humeur. Enfin, ceci est son problème, pas le notre. Il tenta de passer une main dans ses cheveux, mais tout était si flou, vu par ses yeux, qu’il rata son crâne et s’assomma à moitié en frappant son front. Les objets dansaient devant lui et il pensa qu’il ne tarderai pas à voir des éléphants roses lui sauter dans les bras. A cette pensée d’une idiotie peu commune, il sourit. Sa vue redevenait peu à peu claire et il pouvait à présent se déplacer dans sa chambre sans risquer de rencontrer de façon brutale les murs.

Apercevant une porte devant lui, Michael tendit la main et se dévissa le poignet en tentant de tourner la poignée. Après quelques essais infructueux, il réussi à se glisser dans la pièce et manqua de glisser sur le carrelage luisant. La salle de bain. En voyant la grande baignoire en marbre blanc qui lui tendait les bras, le jeune homme se dit qu’une petite douche ne lui ferait pas de mal – il ne voulait pas se l’avouer, mais il sentait bien que sa chambre empestait sérieusement. Et lui de même. Aussi il se débarrassa rapidement de ses vêtements et se glissa avec délice dans l’eau chaude. Avant de se rendre compte qu’elle était peut-être un peu trop chaude. Il empoigna le robinet d’eau froide et ouvrit les vannes en grand. La baignoire se rafraîchit aussitôt et Michael poussa un soupir de soulagement ; sauf qu’au bout de quelques instants, il se mit à grelotter. Agacé, le jeune homme pris la sage décision de sortir de la baignoire et de remettre ce lavage à plus tard. Il passa une jambe par-dessus le rebord de la douche et saisit une serviette blanche en prenant soin de ne pas glisser sur le carrelage. Il se dirigea vers la porte de la salle de bain, le carré de tissu noué autour de sa taille, et ouvrit la porte à la volée. Il passa rapidement un jean noir, des baskets à moitié foutues et un sweat vert orné de losanges avec un court blouson en toile noir. On s’en fout si ça fait moche, c’est juste pour aller faire du shopping. Car oui, Michael avait une nette tendance à faire sa fille et à occuper ses samedis en faisant les magasins. Et comme il appréciait d’être à la pointe de la mode, il n’était pas rare que son « budget vêtement » soit pour le moins… élevé.

Le jeune homme quitta sa chambre et traversa les couloirs déserts jusqu’à l’arrêt de bus situé devant l’université. Là, il s’appuya nonchalamment contre un réverbère, arborant un sourire de séducteur ; mais en même temps, n’était-ce pas ce qu’il était, jusqu’au plus profond de lui-même ? Cette pensée fit redoubler son sourire. Plusieurs filles tournèrent la tête vers ce garçon semblant un ange tombé du ciel et se prirent accidentellement quelque chose de plein fouet – généralement poubelle, lampadaire ou même des pauvres passants n’ayant rien demandé. En temps normal, Michael serait venu à leur secours en faisant son numéro de charme, mais aujourd’hui, il ne se sentait pas d’humeur à draguer. Dès que le bus se stoppa devant l’arrêt, le jeune homme s’engouffra à l’intérieur et se précipita sur une place libre. Le bus s’ébranla lentement et conduit Michael à la 32ème Avenue. Je suppose que vous voyez tous une fashion-victim se ruant dans des magasins le premier jour des soldes ; et bien, notre bel étudiant ressemblait à cela – même si la comparaison n’est certainement pas très flatteuse.

Mais bien entendu, l’heure du repas du repas arriva et l’estomac de Mika, ce traître, commença à gargouiller. Le jeune homme n’avait le temps de se casser la tête à rechercher un restaurant, alors il opta un pour un McDo – après tout, il n’avait pas besoin de régime et les cheeseburger étaient si bons… Il pénétra à l’intérieur du fast-food et adressa un sourire rayonnant à la serveuse, une de ses connaissances. Ecoutant les cris de son ventre, Michael commande des nuggets, des frites et un hamburger, le tout accompagné par un Coca light et un muffin au chocolat. Il venait de poser son plateau sur le bar du fond de la salle et se dirigeait vers le comptoir pour prendre une paille quand l’accident survint. Il eut juste le temps de voir une fille aux longs cheveux noirs freiner brutalement devant lui quand il se reçu son plateau dessus. Haha. Il avait l’air malin, le Mika, avec son pull vers maculé de soda et de ketchup. Mais en voyant la jeune fille – qui avait l’air très jolie, d’après le peu qu’il pouvait en voir – tenter vainement de le nettoyer en s’efforçant de ne pas croiser son regard, il ne put s’empêcher d’avoir un léger sourire.

– Oh mon Dieu ! Je suis vraiment désolée, excusez-moi, je suis maladroite, flûte ! Attendez, je vais arranger ça !

En même temps qu’elle poussait ce cri teinté d’un accent d’affolement, l’étudiante releva le visage et Michael put enfin voir son visage ; oui, il la connaissait de vue. C’était un fantôme. Elle s’appelait… ah oui, Ledwine. Joli prénom. Des boucles noires et soyeuses retombaient en cascade sur les épaules de la jeune fille, un nez fin et droit était posé au milieu de sa jolie figure, et ses prunelles étaient d’un brun profond, parsemés de paillettes d’or.

Mais là, Ledwine eut une réaction pour le moins… étrange. Elle fondit en larmes, là, juste devant Michael. Ce dernier haussa un sourcil, surpris. Les larmes roulaient sur ses joues, dans son cou. Elle avait l’air véritablement triste ; puis elle releva la tête et croisa le regard de Mika. Le jeune homme, émut, pris la main de la jeune fille, l’amena au bar et la fit s’asseoir sur un tabouret proche du sien – cette fille avait l’air d’être une proie facile. Et si jolie… Là, il essuya les larmes de Ledwine et lui sourit gentiment.

– Dis moi ce qui na va pas, Ledwine.